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LE PANAFRICANISME NOUVEAU
4 mai 2013

De la permanence de la question nationale

De la permanence de la question nationale 
 
 Qu’il me soit d’abord permis de remercier l’Avomm et sa présidente Rougui DIA  de me faire encore une fois l’honneur de m‘inviter à cette journée commémorant le terrible traumatisme de la déportation des négro-mauritaniens. C’est pour moi une émotion particulière que de me retrouver dans cette salle, dix ans après avoir, pour la première fois, tenu ici une conférence pour implanter l’AJD alors naissante
 
C’est certainement un clin d’œil du destin que de me retrouver aujourd’hui à coté de Hamdou Rabby SY, car c’est avec lui que j’avais animé cette conférence il y a dix ans… C’est dire le plaisir que j’ai à servir cette grande organisation qu’est l’Avomm en compagnie des illustres sommités qui sont à mes cotés.  
  
Cela étant dit, je me propose modestement de vous entretenir de la permanence de la question nationale en Mauritanie, au risque de donner l’impression de patauger dans une certaine banalité thématique. Mais je n’aurais pas été moi-même, ni en cohérence avec la vérité politique qui préside à mon engagement militant, si je contournais cette question centrale de la construction nationale pour envisager l’exposé de questions périphériques ou conjoncturelles... Car je pense profondément, qu’au-delà de sa centralité, la question de la cohabitation des différentes communautés ethniques en Mauritanie a ceci de définitivement impactant pour la Nation, qu’elle n’est pas conjoncturelle mais structurelle. Et c’est cela qui rend sa résolution urgente et même vitale. 
  
La déportation de nos compatriotes noirs en 1989 vers le Sénégal et le Mali que nous commémorons aujourd’hui, révèle en arrière-plan un projet vieux comme le pays, jalousement entretenu par les différents régimes qui se sont succédé à la maison brune. Il ne s’agit pas seulement d’un banal déplacement de populations, mais de quelque chose de bien imaginé, et qui s’adosse sur une planification qui dépasse le seul cadre de la déportation. Le régime de Taya, en procédant à cette déportation, nourrissait le secret espoir d’avoir actionné une des dernières étapes d’un plan global aux allures de génocide. Ceux qui rechignent à employer ce terme au profit de l’euphémisme de « passif humanitaire » jouent à cache-cache avec l’Histoire. Car le projet de de-négrification de la Mauritanie ne souffre d’aucun scepticisme, au regard des différentes tentatives politiques de réinventer un pays exclusivement arabe au bénéfice de la seule composante maure du pays. Il n’y a qu’à interroger notre histoire politique récente et les évènements qui l’ont emmaillée pour s’en convaincre. Comment interpréter sinon, les évènements de 1966, ceux de 1979, ceux de 1986, ceux de 1989, 1990 et 1991 ?  Et comment interpréter aujourd’hui cet enrôlement raciste qui tente d’établir un génocide biométrique écartant de la nationalité le maximum de noirs possibles ?  En vérité, de mémoire de citoyen, jamais projet n’a été aussi rigoureusement suivi en Mauritanie. Si dans ce pays les problèmes de développement posent souvent la question du suivi des projets qui y sont initiés, il y a au moins un projet qui n’a pas souffert de ce mal atavique de nos gouvernants successifs, c’est celui de la construction nationale sur une base exclusivement arabe et profondément anti-africaine. La sortie de la CEDEAO contre toute logique, et contre les intérêts même de la Mauritanie et de nombre de ses commerçants, n’est intelligible que par la permanence de ce projet et son placement comme prioritaire sur tout le reste ! On avait l’habitude qu’en Mauritanie un projet n’aboutisse pas faute de suivi ou parce qu’il a été détourné. Celui-là semble au contraire tenir tellement  à l’establishment qu’il  na l’air de  souffrir d’aucune négligence de la part de ceux qui ont charge de le mener à bout. 
  
Face à cette réalité politique, quelle attitude recommander aux partis et mouvements progressistes?  La configuration des tiraillements politiques en Mauritanie semble aujourd’hui se cristalliser essentiellement autour d’un duopole qui semble plus préoccupés par les questions institutionnelles et de mécanique de pouvoir que par les problèmes de fond qui reposent la question nationale comme point de départ à toute entente sérieuse.  Le pôle de la COD plus visible au sein de l’opposition et qui donne le change à la majorité présidentielle semble privilégier la logique de l’alternance au pouvoir là où nous avons la faiblesse de penser qu’il faut proposer plutôt une alternative au système. 
  
Il appartient aux partis, mouvements et organisations progressistes qui ont en commun cette analyse qui replace au centre du débat la prééminence de la question nationale, d’occuper ce boulevard déserté par les pôles plus visibles sur la scène.  L’Ajd-mr a certainement un rôle important à jouer dans cette nouvelle dynamique, avec ses partenaires naturels.  Recentrer le débat sur l’essentiel, pour ne pas dire sur le vital, est une impérieuse nécessité. La Mauritanie se sentirait trahie par ses enfants si tous désertaient la question essentielle de la construction d’une nation arc-en-ciel pour des questions politiquement plus confortables, parce que moins lourdes à porter.  Et dans cette exigence, les négro-africains, bousculés par de nouvelles provocations, sont en droit de piaffer d’impatience.  Dans un pays où ils s’estiment citoyens à part entière, ils en ont marre de continuer à être regardés comme des citoyens entièrement à part.  Le droit à la différence que nous appelons de nos vœux pour établir cette citoyenneté non discriminante pour les noirs n’a d’ailleurs de sens, que s’il a vocation à aboutir au droit à l’indifférence, dans une Mauritanie où l’épiderme ne sera plus ni un avantage, ni un inconvénient, mais un banal phénotype non monnayable politiquement.
 
Bocar Oumar BA,

Secrétaire National de l’AJD/MR en charge de la Diaspora

Bruxelles, le 27 avril 2013

© AVOMM  2013

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  • Le Panafricanisme est une idée politique et un mouvement qui promeuvent et encouragent la pratique de la solidarité entre les africains où qu'ils soient dans le monde. Le panafricanisme est à la fois une vision sociale, culturelle et politique d'émancipati
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